Citizen Poulpe - Critiques de films
  • Critiques de films
    • Toutes les critiques de films
    • Drame
    • Policier / Thriller
    • Horreur
    • Fantastique
    • Science-fiction
    • Comédies / Comédies dramatiques
    • Western
    • Espionnage
    • Guerre
    • Aventures / Action
    • Documentaire
    • Courts métrages
  • Extraits de films
  • Musique et cinéma
  • Dossiers
    • Dossiers thématiques
    • Portraits croisés
    • Personnalités
  • Recueil de nouvelles
  • Contact
Valley of Love
Fantastique 0

Valley of Love

Par Bertrand Mathieux · Le 30 janvier 2018

Film de Guillaume Nicloux
Pays : France
Année de sortie : 2015
Scénario : Guillaume Nicloux
Photographie : Christophe Offenstein
Montage : Guy Lecorne
Avec : Gérard Depardieu, Isabelle Huppert, Dan Warner, Aurélia Thierrée, Dionne Houle

Gérard : Les cheveux encore ça va, mais les sourcils c’est ça qui me tue. Perdre ses sourcils, c’est complètement con.

Valley of Love rôde mystérieusement entre le réalisme et le fantastique, la réalité et la fiction, préférant émouvoir et interroger plutôt que d’articuler un discours.

Synopsis du film

Isabelle (Isabelle Huppert) et Gérard (Gérard Depardieu) sont séparés depuis longtemps. Ensemble, ils ont eu un fils, Michael, qu’ils ne voyaient plus et qui s’est suicidé récemment, aux États-Unis.

Une chose fort étrange se produit alors : Isabelle et Gérard reçoivent chacun une lettre de Michael, écrite après sa mort. Il leur demande de se rendre tous les deux dans la Vallée de la Mort, en Californie, et d’y visiter des endroits précis, à des heures précises.

Si les parents endeuillés respectent ce souhait posthume, Michael leur promet une chose : il leur apparaîtra une dernière fois…

Critique de Valley of Love

Isabelle (racontant un rêve) : Je vous regarde, et vos yeux ils sont tellement noirs, mais tellement noirs…
Gérard : C’est tout ?
Isabelle : Oui.
Gérard : Pas terrible… Un rêve à la con.
Isabelle : C’est un rêve !
Gérard : Oui, mais c’est un rêve à la con.

Trente-cinq : c’est le nombre d’années qui séparent la sortie de Valley of Love (2015) de celle de Loulou (1980) de Maurice Pialat, le seul film (avant celui de Guillaume Nicloux) qui avait réuni ces deux immenses comédiens, d’envergure internationale, que sont Gérard Depardieu et Isabelle Huppert.

Certes, ils s’étaient rencontrés sur le tournage des Valseuses (1974) de Bertrand Blier, dans lequel Huppert avait fait l’une de ses premières apparitions cinématographiques (elle y incarnait une adolescente rebelle qui s’offrait une virée « scandaleuse » avec le fameux trio libertin composé de Depardieu, Dewaere et Miou-Miou). Mais le tandem Depardieu-Huppert n’éclata vraiment à l’écran que dans le film, vaguement autobiographique, que Maurice Pialat tourna à la toute fin des années 70 ; un très beau film, d’ailleurs, et un film clé, dans la mesure où il est à l’origine de l’amitié et de la collaboration fructueuse entre Gérard Depardieu et Maurice Pialat, qui allaient tourner trois autres longs métrages ensemble (Police ; Sous le soleil de Satan ; Le Garçu).

Il est important de souligner cette complicité intime et artistique, car elle est probablement l’une des raisons pour lesquelles Valley of Love put être tourné : c’est en effet Sylvie Pialat, la veuve de Maurice Pialat (et productrice du film) qui parla du rôle à Gérard Depardieu, lequel fut immédiatement séduit à la lecture du scénario (très construit et écrit, contrairement à ce que la vision du film pourrait laisser croire).

Gérard Depardieu et Isabelle Huppert dans "Valley of Love"
Gérard (Gérard Depardieu) et Isabelle (Isabelle Huppert) dans « Valley of Love »

Il est difficile d’ignorer ces éléments de contexte quand on regarde Valley of Love, tant le film leur fait écho. Les deux protagonistes sont en effet des projections des comédiens qui les incarnent : ils s’appellent Gérard et Isabelle, et sont deux acteurs français connus également aux États-Unis. Ils ont été ensemble par le passé, et on songe de fait immédiatement à Loulou, où Depardieu et Huppert jouaient deux amants. Bref, les clins d’œil et similitudes avec la « réalité », qu’ils concernent la filmographie ou la vie personnelle des deux stars (Depardieu partage avec son personnage la ville de Châteauroux dont il est originaire mais aussi, hélas, le deuil d’un fils), sont si évidents qu’en les réunissant à l’écran, Guillaume Nicloux convoque une partie de leur mythologie et de leur aura — et pourtant, on sent que c’est leur humanité qui l’intéresse avant tout.

Ce qui est intéressant, c’est que ces éléments issus du « monde réel » sont intégrés à un récit imprégné de fantastique (qui côtoie un quotidien réaliste, un peu comme dans Les Amis des amis d’Henry James, ou certaines nouvelles de Julio Cortázar), dans lequel les frontières entre le faux et le vrai, le réel et l’illusion, l’ordinaire et l’étrange s’avèrent poreuses. Ces ingrédients se mélangent étonnamment bien. Nicloux réussit même quelque chose de surprenant : si l’on a en partie le sentiment de voir les vrais Gérard Depardieu et Isabelle Huppert, ils restent néanmoins des personnages de fiction, dans un récit de fiction. Ces impressions a priori incompatibles cohabitent ici avec une évidence qui échappe à l’analyse.

Le scénario est d’une belle simplicité, d’une profonde limpidité, de même que les dialogues, d’un naturel confondant. On sent que Guillaume Nicloux a voulu aller à l’essentiel, éviter les fioritures et le superflu. D’ailleurs, les comédiens nous apparaissent sans fard : Depardieu est souvent à moitié nu, aucun d’eux n’est maquillé ou embelli d’une quelconque façon. Ils sont extraordinaires, il faut le souligner : il émane de leur « jeu » — et le terme semble même impropre ici — une authenticité, une spontanéité qui font oublier toute notion de composition.

Autour du tandem Isabelle-Gérard, on pourrait dire qu’il y a essentiellement deux autres personnages : leur fils disparu, à la fois absent et omniprésent puisqu’il « dirige », par le biais d’une lettre posthume, le parcours géographique et initiatique de ses parents (presque à la manière d’un metteur en scène) ; et puis le paysage, qui semble dicter au récit son rythme et son atmosphère.

Isabelle Huppert dans "Valley of Love"
Isabelle (Isabelle Huppert) dans « Valley of Love »

Le titre du film fait d’ailleurs référence au paysage en question (la vallée de la Mort) via une logique de détournement, puisque Valley of Love signifie vallée de l’amour. C’est en effet d’amour dont il est question ici. D’amour, de pardon, de fantômes, de deuil également. (Notons que le deuil est un thème récurrent dans le cinéma de Nicloux — même le détective alcoolique dans Une Affaire privée est en deuil ; le deuil d’une relation amoureuse, en l’occurrence.)

Le thème musical The Unanswered Question, écrit en 1908 par le compositeur américain Charles Ives, contribue à créer une atmosphère étrange, quasi méditative qui dans quelques scènes (notamment lors d’une rencontre surréaliste entre Gérard et une inconnue défigurée) fait vaguement songer à l’univers de David Lynch (le fait que certains thèmes d’Angelo Badalamenti, compositeur attitré de l’auteur de Blue Velvet, évoquent quelque peu le style de Charles Ives n’est pas étranger à cette impression).

On relèvera que le titre du morceau est de circonstances : « question sans réponse » convient fort bien à un type de cinéma qui aime le mystère et rejette les réponses toutes faites, les explications définitives. Or celui de Guillaume Nicloux (Une Affaire privée ; Cette femme-là ; The End) s’inscrit clairement dans cette veine, et Valley of Love est peut-être l’un de ses films qui va le plus loin dans cette démarche.

À voir et à écouter autour du film

Guillaume Nicloux parle de Valley of Love dans l’émission Boomerang

En juin 2015, Augustin Trapenard recevait Guillaume Nicloux dans son émission Boomerang, sur France Inter. L’entretien est particulièrement intéressant.

Interview de Guillaume Nicloux, Isabelle Huppert et Gérard Depardieu

8 Note globale

Valley of Love a une particularité intéressante : les dialogues, souvent assez drôles et bien écrits, sont importants mais pas davantage que ce qui n'est pas dit ; de même, ce que l'on voit à l'écran n'est pas plus important (parfois moins) que ce que l'on n'y voit pas. Ainsi le visible et l'invisible, l'audible et l'inaudible se côtoient dans un récit à la fois limpide et mystérieux, fantastique et réaliste, drôle et émouvant. Quant à Isabelle Huppert et Gérard Depardieu, leur prestation se passe de commentaires : ce qu'ils livrent à la caméra est d'une force aussi inexplicable que les événements qui se produisent dans le film.

DeuilFantastique réelGérard DepardieuGuillaume NiclouxIsabelle HuppertOnirique
Partager Tweet

Bertrand Mathieux

Principal contributeur du blog Citizen Poulpe. Parmi mes cinéastes préférés : Michael Cimino ; Claude Chabrol ; Maurice Pialat ; Michael Powell ; Kelly Reichardt ; Arthur Penn ; Olivier Assayas ; Emmanuel Mouret ; Guillaume Brac ; Francis Ford Coppola ; Michel Deville ; Guillaume Nicloux ; Karim Moussaoui ; Woody Allen ; Sam Peckinpah ; Nacho Vigalondo ; Danielle Arbid ; Jean-Pierre Melville ; David Lynch ; Billy Wilder ; David Mamet ; William Friedkin ; Nicolas Pariser ; Sergio Leone ; Jane Campion ; Miguel Gomes ; Ari Aster ; Christian Vincent ; Sidney Lumet ; Dominik Moll ; Ernst Lubitsch ; Gilles Marchand ; Alfred Hitchcock ; John Carpenter ; Otto Preminger ; Whit Stillman ; Nicholas Ray...

Vous aimerez également

  • The End Fantastique

    The End

  • Loulou Drame

    Loulou

  • Les Bonnes manières Fantastique

    Les Bonnes manières

Aucun commentaire

Laisser un commentaire Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Rechercher une critique de film

Facebook

Facebook

Dernières actualités

  • Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

    Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

    2 janvier 2023
  • PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

    PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

    13 décembre 2022

Critiques les plus récentes

  • Ashkal

    Ashkal

    28 janvier 2023
  • Wekufe

    Wekufe

    26 janvier 2023

Critiques les plus consultées

L'Apparition
XX
PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador
Blow Out
La Moustache
Moloch
Resurrection
Candyman

Rechercher un film par thématique

  • Chronique intimiste
  • Critique sociale
  • Couples en plein doute
  • Détectives
  • Disparitions
  • Fantômes et apparitions
  • Féminisme
  • Jeux de l'amour et du hasard
  • Joies du libéralisme
  • Monstres et cie
  • Onirique
  • Politique
  • Questionnement identitaire
  • Réalisatrices
  • Récit initiatique
  • Relation vénéneuse
  • Sorcellerie
  • Transformation
  • Le travail c'est la santé

Abonnez-vous !

Abonnez-vous à Citizen Poulpe pour recevoir une notification par email à chaque nouvel article publié.

  • Critiques de films
    • Toutes les critiques de films
    • Drame
    • Policier / Thriller
    • Horreur
    • Fantastique
    • Science-fiction
    • Comédies / Comédies dramatiques
    • Western
    • Espionnage
    • Guerre
    • Aventures / Action
    • Documentaire
    • Courts métrages
  • Extraits de films
  • Musique et cinéma
  • Dossiers
    • Dossiers thématiques
    • Portraits croisés
    • Personnalités
  • Recueil de nouvelles
  • Contact

Dossiers cinéma

  • Les « Dinner Parties From Hell » au cinéma

    Les « Dinner Parties From Hell » au cinéma

    19 avril 2020
  • Qui suis-je ? Exemples de troubles identitaires au cinéma

    Qui suis-je ? Exemples de troubles identitaires au cinéma

    22 novembre 2018
  • Les légendes urbaines dans le cinéma des années 90 et 2000

    Les légendes urbaines dans le cinéma des années 90 et 2000

    30 mai 2018

Actualités

  • Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

    Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

    2 janvier 2023
  • PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

    PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

    13 décembre 2022
  • PIFFF 2022 : courts-métrages internationaux

    PIFFF 2022 : courts-métrages internationaux

    12 décembre 2022

Musique et cinéma

  • Le Ballon rouge : réécriture de la musique originale

    Le Ballon rouge : réécriture de la musique originale

    3 avril 2021
  • « Safe Travels » par Peter and the Wolf dans « Villains »

    « Safe Travels » par Peter and the Wolf dans « Villains »

    25 avril 2020
  • « Soul on Fire » par LaVern Baker dans « Angel Heart »

    « Soul on Fire » par LaVern Baker dans « Angel Heart »

    26 mars 2020

Recherche

Consultez l’index des critiques de films.

Sites conseillés

Découvrez une sélection de sites conseillés par Citizen Poulpe.

Citizen Kane, c’est un film qui a révolutionné le cinéma, aussi bien par ses innovations visuelles que narratives. Le poulpe, et en particulier le poulpe géant, est un animal marin mythique, qui se démarque par son charisme, sa capacité d’adaptation, et sa connaissance de lui-même. Citizenpoulpe.com est un hommage au cinéma et à la grandeur solennelle du poulpe.

Blog sous license Creative Commons. Propulsé par WordPress.