Citizen Poulpe - Critiques de films
  • Critiques de films
    • Toutes les critiques de films
    • Drame
    • Policier / Thriller
    • Horreur
    • Fantastique
    • Science-fiction
    • Comédies / Comédies dramatiques
    • Western
    • Espionnage
    • Guerre
    • Aventures / Action
    • Documentaire
    • Courts métrages
  • Extraits de films
  • Musique et cinéma
  • Dossiers
    • Dossiers thématiques
    • Portraits croisés
    • Personnalités
  • Recueil de nouvelles
  • Contact
Marlon Brando dans "La Poursuite impitoyable"
Drame 10

La Poursuite impitoyable

Par Bertrand Mathieux · Le 29 novembre 2007

Film d’Arthur Penn
Titre original : The Chase
Année de sortie : 1966
Pays : États-Unis
Scénario : Lillian Hellman, d’après l’œuvre de Horton Foote
Photographie : Joseph LaShelle et Robert Surtees
Montage : Gene Milford
Musique : John Barry
Avec : Marlon Brando, Jane Fonda, Robert Redford, Robert Duvall, Janice Rule, E. G. Marshall.

DAMON : Good to see you patrolling.
SHERIFF CALDER : I’m not patrolling, I was just looking for an ice-cream cone.
LEM : Taxes on this town pay your salary, Calder, to protect the place.
SHERIFF CALDER : Well, if anything happens to you, Lem, we’ll give you a refund.

Avec La Poursuite impitoyable, Arthur Penn dresse le portrait d’une Amérique texane minée par le racisme, la bêtise, l’ignorance et la violence. Le film préfigure, à certains égards, le Nouvel Hollywood, dont Penn signera l’acte de naissance l’année suivante avec Bonnie and Clyde.

Synopsis de La Poursuite impitoyable

Bobby Reeves (Robert Redford) s’évade de prison quelques mois avant sa libération. Tentant de rejoindre le Mexique en train, il se trompe de direction et se retrouve précisément dans la petite ville dont il est originaire, dans l’État du Texas.

Dès lors, plusieurs personnes cherchent à le retrouver, pour des raisons distinctes : sa femme Anna (Jane Fonda) et Jake (James Fox), l’amant de cette dernière (également ami d’enfance de Bobby) ; Val Rodgers (E. G. Marshall), propriétaire richissime et père de Jake, qui pense que l’évadé va vouloir se venger de son fils ; plusieurs hommes armés qui s’érigent en justiciers locaux ; et enfin le shériff Calder (Marlon Brando), qui souhaite arrêter Bobby pour le protéger du pire.

Au cours d’une nuit longue et mouvementée, tous vont chercher à mettre la main sur le fugitif…

Critique du film

La Poursuite impitoyable, l’un des prémices du Nouvel Hollywood

L’une des particularités de La Poursuite Impitoyable est que le film se situe à la lisière d’un cinéma hollywoodien relativement « classique » (la structure et les dialogues du film demeurent plus conventionnels – ce qui ne constitue en rien un point négatif – que dans les films qu’Arthur Penn réalisera ultérieurement) et du Nouvel Hollywood.

Marlon Brando dans "La Poursuite impitoyable"
Calder (Marlon Brando)

D’un point de vue graphique, La Poursuite Impitoyable annonce les effusions de sang de Bonnie and Clyde, du même réalisateur, considéré à juste titre comme le principal acte fondateur du renouveau du cinéma américain et qui sortira un an plus tard (Serge Gainsbourg en tirera une célèbre chanson).

Jane Fonda dans "La Porusuite impitoyable"
Anna (Jane Fonda)

Sur le fond, La Poursuite Impitoyable s’affirme comme une critique sociale acide. Le film pose un regard désabusé sur une société américaine tout juste sortie de la ségrégation raciale. Cette dimension critique le rapproche également du Nouvel Hollywood, les films associés à ce mouvement ayant fréquemment questionné l’Amérique et ses valeurs, de façon plus ou moins explicite.

La Poursuite impitoyable met en scène des texans majoritairement racistes, stupides, débauchés (la moitié de la ville est ivre morte), incultes, cyniques ou tout cela à la fois. Le film évite cependant la caricature et le manichéisme ; par exemple, le richissime Val Rodgers (E. G. Marshall) bénéficie d’un traitement plutôt nuancé.

Robert Redford dans "La Poursuite impitoyable"
Bobby Reeves (Robert Redford)

Pour les habitants de la petite ville dans laquelle se déroule la majeure partie de l’action, l’évasion d’un homme est l’attraction du samedi soir, au point qu’ils vont tous finir par exercer un effet (néfaste) sur le déroulement des événements.

Ce phénomène de dérive collective (on pourrait parler d’effet de groupe) est particulièrement flagrante dans l’une des dernières scènes de La Poursuite impitoyable, où la vindicte populaire balaie l’ordre social et la justice officielle (incarnée dans le film par le shérif Calder). Cette séquence chaotique comporte de nombreux plans significatifs, dont celui montrant la silhouette de Jane Fonda se découper sur un gigantesque amas de voitures en flammes. On citera également l’image d’un pneu incendié dégringolant dans le vide, symbole d’une société en roue libre.

La Poursuite impitoyable
Le pneu en flammes qui dévale une pente : un plan symbolique.

Si cette société est en l’occurrence américaine, et si le récit comporte des éléments spécifiques qui l’inscrivent dans un cadre social et historique précis (la ségrégation raciale aux USA, qui était en train d’être abolie), La Poursuite impitoyable décrit une violence collective dont le fonctionnement n’est pas particulièrement typique de la société américaine. D’une certaine manière, le film illustre les impacts néfastes de l’ignorance (Calder le répète souvent : personne ne prend le temps de lire un livre autour de lui), du racisme, de l’effet de groupe, autant de réalités présentes dans d’autres sociétés. Il s’agit donc à la fois d’un film décrivant un contexte sociologique et historique précis, et ayant une portée plus vaste, dépassant largement les frontières texanes et états-uniennes.

Le lynchage de Brando : une scène saisissante

Marlon Brando interprète le shérif Calder, sans doute le personnage le plus lucide du film et qui est de fait consterné, du début à la fin, par l’attitude de la majeure partie de ses concitoyens. Il représente la justice, la tolérance et l’intégrité.

Au cours d’une scène devenue célèbre, Calder se fait frapper par trois hommes dans son propre bureau. Ceux-ci le laissent presque inconscient et défiguré par les coups. La caméra montre alors Brando, la démarche incertaine et presque méconnaissable, sortir du poste de police, s’écrouler puis se relever et fixer une foule immobile qui le scrute en silence.

La scène, assez violente pour l’époque et qui aujourd’hui étonne encore par son intensité, présente une dimension symbolique : ces gens passifs qui ne prennent pas parti (ils ne participent pas au lynchage mais aucun ne cherche à aider le shérif), c’est la société face à sa mauvaise conscience. Le visage tuméfié, déformé de Brando est le reflet cauchemardesque d’une violence qui apparaît soudain au grand jour – mais elle ne suscite qu’un voyeurisme passif, de l’indifférence ou tout au plus de la perplexité chez les personnes qui y assistent.

C’est donc une séquence qui, de par sa volonté d’exposer la violence sans détours, représente très bien la démarche d’Arthur Penn et plus globalement, le traitement de la violence par les auteurs du Nouvel Hollywood.

Sans illusions

La Poursuite impitoyable est sans espoir : sa conclusion est l’une des plus noires du cinéma américain de l’époque. L’Amérique dépeinte dans le film demeure embourbée dans ses travers et la mort, la fuite ou la solitude représentent la seule issue des rares personnages dotés d’un peu d’intelligence et de morale.

Un grand film désabusé, servi par un casting prestigieux qui réunit Marlon Brando (Reflets dans un œil d’or ; The Missouri Breaks) dans l’un de ses plus grands rôles, la superbe Jane Fonda, Robert Redford (Butch Cassidy et le Kid, Les Trois jours du Condor), Robert Duvall (Le Parrain, Apocalypse Now) et Janice Rule (The Swimmer). On soulignera également la qualité de la bande originale de John Barry, illustre compositeur de musiques de films.

9 Note globale

La Poursuite impitoyable est une œuvre amère et lucide sur la violence et la bêtise collectives, qui annonçait l'arrivée du Nouvel Hollywood. L'un des grands films du cinéma américain des années 60, ce qui n'est pas peu dire...

Amérique profondeArthur PennCritique socialeJane FondaMarlon BrandoRobert Redford
Partager Tweet

Bertrand Mathieux

Principal contributeur du blog Citizen Poulpe. Parmi mes cinéastes préférés : Michael Cimino ; Claude Chabrol ; Maurice Pialat ; Michael Powell ; Kelly Reichardt ; Arthur Penn ; Olivier Assayas ; Emmanuel Mouret ; Guillaume Brac ; Francis Ford Coppola ; Michel Deville ; Guillaume Nicloux ; Karim Moussaoui ; Woody Allen ; Sam Peckinpah ; Nacho Vigalondo ; Danielle Arbid ; Jean-Pierre Melville ; David Lynch ; Billy Wilder ; David Mamet ; William Friedkin ; Nicolas Pariser ; Sergio Leone ; Jane Campion ; Miguel Gomes ; Ari Aster ; Christian Vincent ; Sidney Lumet ; Dominik Moll ; Ernst Lubitsch ; Gilles Marchand ; Alfred Hitchcock ; John Carpenter ; Otto Preminger ; Whit Stillman ; Nicholas Ray...

Vous aimerez également

  • The Missouri Breaks Western

    The Missouri Breaks

10 commentaires

  • Pétronille dit : 30 novembre 2007 à 15 h 41 min

    …
    Ce monde est décidément bien trop cruyel.

    Répondre
  • Cedric dit : 30 novembre 2007 à 17 h 29 min

    Bien joué petit

    Répondre
  • borano varren dit : 6 mars 2012 à 20 h 28 min

    c’est le meilleur de tout les temps je ne peux mieux dire il a métamorphose le cinema il est plus que naturel dans ces rôles ah ce marlon brando

    Répondre
  • Jean-Pascal Mattei dit : 12 août 2013 à 16 h 14 min

    Éclairé par le père de Bruce Surtees.

    Répondre
  • Chambouleyron Jacques dit : 27 février 2014 à 15 h 05 min

    Aprés avoir vu le film et parcouru les critiques : Oui, c’est un film américain , les acteurs sont américains, le réalisateur aussi. C’est un western . Il se déroule dans le sud esclavagiste . Certes! mais il atteint à l’universel . La lâcheté ,la bêtise ,le racisme, la violence,le déchaînement des foules,le pouvoir, l’argent sont de tous les lieux et de tous les temps. La biture, l’échangisme ne sont pas made in USA. En 1966 l’Amérique n’est pas marquée au fer rouge de l’indignité :la preuve aujourd’hui où elle est plus puissante que jamais avec la MSA. Avons nous des leçons à donner sur toutes ces exactions américaines nous l’ Europe de la Solution finale !!!

    Répondre
    • Bertrand Mathieux dit : 1 mars 2014 à 13 h 17 min

      Vous avez raison de souligner la dimension « universelle » du propos, mais vous vous méprenez totalement si vous voyez dans cet article la moindre condescendance vis-à-vis des États-Unis ou un côté donneur de leçon ! Quand on écrit à propos d’un film tel que celui-ci, il est difficile de ne pas le contextualiser, tant l’histoire est profondément ancrée dans une culture et une époque précises. Oui, Arthur Penn jette un regard sur une certaine Amérique dans ce film, c’est une évidence, tout comme Yves Boisset chronique une certaine France dans « Dupont Lajoie » ; ces deux films dénoncent des travers qui effectivement n’ont pas de frontières, mais ils ont également un propos plus spécifique sur une société, un milieu culturel. Ne pas évoquer cet aspect reviendrait à dire à peu près la même chose d’une multitude de films et l’exercice serait aussi lassant pour l’auteur que pour les lecteurs !

      Répondre
  • Vento dit : 15 avril 2014 à 0 h 34 min

    Je viens de voir ce film et je suis arrivé à votre critique très juste. Étrange période du cinéma américain. Deux choses que j’ai relevées: la ferraille, le cimetière de la bagnole, emblème des US. La seconde, c’est ce personnage qui traverse le film comme il traverse la ville, le petit vieux en blanc qui semble être la figure de la neutralité, de la sagesse et/ou de la moralité du bon sens — et qui ne dit rien quand Calder est mis au carreau. On le revoit quelques minutes plus tard, en flou, en vision subjective, à travers le regard du shérif, dissimulé dans la foule.
    Film puissant qui préfigure — qui signe — le Nouvel Hollywood. Peckinpah a dû le manger et remanger. Petite chose: j’ai lu ici et là que le producteur l’avait massacré. Quelqu’un en sait-il plus?

    PS: non, ce n’est pas un film contre les States. Et citer Dupont-Lajoie est adéquat.

    Répondre
    • Bertrand Mathieux dit : 1 mai 2014 à 15 h 06 min

      Je ne pense pas que l’on puisse parler de « massacre » par la production, mais il est vrai qu’Arthur Penn a souvent exprimé sa désapprobation vis-à-vis du montage final. Ce désaccord portait notamment sur le choix des prises retenues au montage ; Penn cite notamment des prises où Brando aurait effectué des improvisations remarquables, et dont il considère la perte comme l’une des pires déceptions de sa carrière ([…] over the years, until his death last year, he [Arthur Penn] repeatedly described how the takes used by the editors weren’t the ones he would have chosen. He considered the loss of several takes of Brando charged with improvisatory expressiveness one of the great misfortunes of his career). Source : Arthur Penn’s American Agonia: THE CHASE

      Répondre
  • DELEVOYE Lionel dit : 16 décembre 2014 à 16 h 31 min

    Ce film vu sur ARTE est prodigieux, il est très significatif de cette période des USA : cette ville du Texas repliée sur elle même et toujours en conflit avec le Nord : la scène quand le Noir est pris à partie par les trois « blancs » lorsqu’il se promène sur le trottoir.
    Le jeu d’acteur est superbe : Brando, Redford, Jane FONDA, Robert DUVALL.

    Répondre
  • REEB dit : 2 novembre 2016 à 14 h 37 min

    Ce film qui passe et repasse sur nos écrans est magnifique. Brando creve toujours l’écran
    par sa séduction, son charisme. Le thème est vu et revu, on s’y laisse toujours prendre. Fonda,
    Redford, tous de très grands acteurs. Beau cinéma des années 60. A voir et à revoir !!!

    Répondre
  • Laisser un commentaire Annuler la réponse.

    Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

    Rechercher une critique de film

    Facebook

    Facebook

    Dernières actualités

    • Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

      Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

      2 janvier 2023
    • PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

      PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

      13 décembre 2022

    Critiques les plus récentes

    • Petite fleur

      Petite fleur

      21 mars 2023
    • Les Petits câlins

      Les Petits câlins

      25 février 2023

    Critiques les plus consultées

    Le Troisième homme
    Snow Therapy
    Wounds
    La Moustache
    L'Apparition
    Scarface
    The Woman
    Carnivores

    Rechercher un film par thématique

    • Chronique intimiste
    • Critique sociale
    • Couples en plein doute
    • Détectives
    • Disparitions
    • Fantômes et apparitions
    • Féminisme
    • Jeux de l'amour et du hasard
    • Joies du libéralisme
    • Monstres et cie
    • Onirique
    • Politique
    • Questionnement identitaire
    • Réalisatrices
    • Récit initiatique
    • Relation vénéneuse
    • Sorcellerie
    • Transformation
    • Le travail c'est la santé

    Abonnez-vous !

    Abonnez-vous à Citizen Poulpe pour recevoir une notification par email à chaque nouvel article publié.

    • Critiques de films
      • Toutes les critiques de films
      • Drame
      • Policier / Thriller
      • Horreur
      • Fantastique
      • Science-fiction
      • Comédies / Comédies dramatiques
      • Western
      • Espionnage
      • Guerre
      • Aventures / Action
      • Documentaire
      • Courts métrages
    • Extraits de films
    • Musique et cinéma
    • Dossiers
      • Dossiers thématiques
      • Portraits croisés
      • Personnalités
    • Recueil de nouvelles
    • Contact

    Dossiers cinéma

    • Les « Dinner Parties From Hell » au cinéma

      Les « Dinner Parties From Hell » au cinéma

      19 avril 2020
    • Qui suis-je ? Exemples de troubles identitaires au cinéma

      Qui suis-je ? Exemples de troubles identitaires au cinéma

      22 novembre 2018
    • Les légendes urbaines dans le cinéma des années 90 et 2000

      Les légendes urbaines dans le cinéma des années 90 et 2000

      30 mai 2018

    Actualités

    • Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

      Le TOP cinéma 2022 de Citizen Poulpe

      2 janvier 2023
    • PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

      PIFFF 2022 : La Montagne, de Thomas Salvador

      13 décembre 2022
    • PIFFF 2022 : courts-métrages internationaux

      PIFFF 2022 : courts-métrages internationaux

      12 décembre 2022

    Musique et cinéma

    • Le Ballon rouge : réécriture de la musique originale

      Le Ballon rouge : réécriture de la musique originale

      3 avril 2021
    • « Safe Travels » par Peter and the Wolf dans « Villains »

      « Safe Travels » par Peter and the Wolf dans « Villains »

      25 avril 2020
    • « Soul on Fire » par LaVern Baker dans « Angel Heart »

      « Soul on Fire » par LaVern Baker dans « Angel Heart »

      26 mars 2020

    Recherche

    Consultez l’index des critiques de films.

    Sites conseillés

    Découvrez une sélection de sites conseillés par Citizen Poulpe.

    Citizen Kane, c’est un film qui a révolutionné le cinéma, aussi bien par ses innovations visuelles que narratives. Le poulpe, et en particulier le poulpe géant, est un animal marin mythique, qui se démarque par son charisme, sa capacité d’adaptation, et sa connaissance de lui-même. Citizenpoulpe.com est un hommage au cinéma et à la grandeur solennelle du poulpe.

    Blog sous license Creative Commons. Propulsé par WordPress.