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Analyse de scènes 1

Analyse de scène : Christopher Walken et Isabelle Huppert dans « La Porte du paradis »

Par Bertrand Mathieux · Le 17 mars 2012

De par sa délicatesse et aussi sa relation avec l’histoire et une autre séquence de La Porte du paradis (lire la critique), cette scène interprétée par Isabelle Huppert et Christopher Walken est aussi émouvante que significative.

Cimino et les scènes d’intimité

Nous sommes en 1892, dans le Wyoming, un peu avant le début de la bataille du Comté de Johnson (lire Johnson County War, sur Wikipédia). Dans cette scène, Nate Champion (Christopher Walken) invite Ella Watson (Isabelle Huppert) dans son ranch. Il s’agit d’une séquence très représentative de la dimension romantique et lyrique du cinéma de Michael Cimino, et de sa manière de filmer les scènes d’intimité entre hommes et femmes. Son précédent long-métrage, le célèbre Voyage au bout de l’enfer (The Deer Hunter), comportait déjà de nombreuses scènes de ce type, notamment entre Robert de Niro et Meryl Streep.

Chez Cimino, ces moments sont toujours émouvants et d’une grande délicatesse. Il les fait volontairement s’étirer, jouant beaucoup sur les silences et les regards entre les comédiens, s’attachant à saisir au mieux les émotions et sentiments des personnages avec une sensibilité contenue, tout en pudeur et en suggestions. Comme dans Voyage au bout de l’enfer et plus tard L’Année du dragon, le réalisateur utilise presque toujours de la musique pour accompagner ces séquences. En l’occurrence, on entend ici l’un des thèmes récurrents de la superbe BO de La Porte du paradis, composée par David Mansfield. D’ailleurs, les BO de Voyage au bout de l’enfer (par Stanley Myers), de La Porte du paradis et de L’Année du Dragon (par David Mansfield) sont assez proches : on y retrouve des thèmes mélancoliques, joués principalement à la guitare ou à la mandoline.

Isabelle Huppert dans "La Porte du paradis"

Civilizing the wilderness

Ce qui est touchant dans cette séquence, c’est bien entendu le papier journal dont Nate a tapissé les murs pour civiliser la sauvagerie (civilizing the wilderness) et la réaction d’Ella (it’s beautiful), émue par cette intention. La justification donnée par Champion (civilizing the wilderness) est profondément liée à l’histoire d’un film qui, précisément, décrit une société américaine où les rapports de force et de pouvoir, les intérêts privés, l’emportent sur la justice, la paix sociale et l’équité. L’aspiration de Nate ne trouve donc malheureusement pas de réel écho dans la société qui l’entoure.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si cette séquence entretient une correspondance directe avec une autre scène du film, particulièrement spectaculaire et violente, à savoir l’attaque (authentique) du ranch de Nate Champion par des mercenaires à la solde de riches propriétaires locaux ; on y voit en effet Walken regarder amèrement le même papier journal se consumer dans les flammes qui rongent sa maison (le véritable Nate Champion fut effectivement l’une des premières victimes de la bataille du Comté de Johnson ; lire Nate Champion, sur Wikipédia).

Le message est limpide : la violence et la sauvagerie (wilderness) inhérentes à la page tragique de l’histoire américaine dont traite La Porte du paradis ont raison des meilleures intentions, pour reprendre la formule de Bergman. A travers le papier journal, c’est la modeste image de la civilisation imaginée par Nate qui part en fumée. D’ailleurs, le film dans son ensemble reflète l’échec et la destruction de tout ce qui a été – ou aurait pu être – beau, aussi bien à l’échelle individuelle que collective.

Christopher Walken dans "La Porte du paradis"

Isabelle Huppert et Christopher Walken, auquel Cimino avait offert, avec Voyage au bout de l’enfer, son premier grand rôle, y sont évidemment pour beaucoup dans la réussite de cette scène à la fois belle, simple et significative. Tout comme la photographie du grand chef opérateur Vilmos Zigmond, qui donne au film un cachet pictural évident ; on remarquera notamment la lumière passant par la fenêtre en arrière plan, du plus bel effet.

De telles scènes sont loin d’être faciles à tourner ; dans beaucoup de films, elles tendent vers la banalité ou la mièvrerie. Il faut de grands acteurs et un metteur en scène au dessus du lot pour leur donner une émotion à la fois juste, belle et contenue, ainsi qu’une résonance particulière. Ici, du fait de ce qui arrive plus tard dans le film (l’incendie du ranch et le papier journal qui brûle), cette séquence prend une ampleur et une signification encore plus émouvantes.

A lire également :

  • La critique de La Porte du paradis

Autres contenus conseillés :

  • Critique de Voyage au bout de l’enfer
  • Critique de L’Année du dragon
  • Article sur Michael Cimino
Christopher WalkenIsabelle HuppertMichael Cimino
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Bertrand Mathieux

Principal contributeur du blog Citizen Poulpe. Parmi mes cinéastes préférés : Michael Cimino ; Claude Chabrol ; Maurice Pialat ; Michael Powell ; Kelly Reichardt ; Arthur Penn ; Olivier Assayas ; Emmanuel Mouret ; Guillaume Brac ; Francis Ford Coppola ; Michel Deville ; Guillaume Nicloux ; Karim Moussaoui ; Woody Allen ; Sam Peckinpah ; Nacho Vigalondo ; Danielle Arbid ; Jean-Pierre Melville ; David Lynch ; Billy Wilder ; David Mamet ; William Friedkin ; Nicolas Pariser ; Sergio Leone ; Jane Campion ; Miguel Gomes ; Ari Aster ; Christian Vincent ; Sidney Lumet ; Dominik Moll ; Ernst Lubitsch ; Gilles Marchand ; Alfred Hitchcock ; John Carpenter ; Otto Preminger ; Whit Stillman ; Nicholas Ray...

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Un commentaire

  • Jean-Pascal Mattei dit : 11 août 2013 à 23 h 45 min

    Un constat : l’Histoire au cinéma n’existe pas ; apparaît en lieu et place la relecture d’une époque, souvent métaphore du contemporain. Ceci vaut notamment pour le péplum, qui traite rarement de l’antiquité mais souvent de réalités politiques américaines ou italiennes datées. Si les coiffures peuvent rompre l’illusion lyrique, même de façon anecdotique, le corps des acteurs et son langage disqualifient la plus pinailleuse reconstitution. Ce faux dialogue entre Isabelle Huppert, à l’expressivité d’un mannequin de cire, et Christopher Walken, blessé dans sa chair, pourrait se dérouler n’importe où en cette fin d’années soixante-dix. Les attitudes, les regards, les silences appartiennent à la fois à la poétique de Cimino et à l’ère du soupçon occidentale bientôt balayée par le bruyant kaléidoscope des années quatre-vingt.

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