Film de Patricia Mazuy
Pays : France
Année de sortie : 2018
Scénario : Patricia Mazuy et Yves Thomas, d’après une idée originale d’Yves Thomas
Photographie : Frédéric Noirhomme
Montage : Mathilde Muyard
Musique : John Cale
Avec : Zita Hanrot, Laurent Lafitte, Idir Chender, Philippe Girard
Paul Sanchez est revenu ! est un thriller atypique, dont l’histoire est prétexte à une réflexion intelligente sur le désir d’évasion du quotidien par le biais du rêve et de la fiction.
Synopsis du film
De nos jours, dans le Var. Des témoins affirment avoir aperçu Paul Sanchez, un criminel local disparu depuis une dizaine d’années après avoir assassiné sa femme et ses enfants. Les autorités sont sceptiques mais Marion, une jeune gendarme, s’intéresse de près à la rumeur…
Critique de Paul Sanchez est revenu !
Le point d’exclamation qui ponctue le titre du film Paul Sanchez est revenu ! est révélateur : le dernier film de Patricia Mazuy est dynamique, rythmé, mené tambour battant, et la remarquable bande originale composée par John Cale (le musicien gallois qui fut membre des Velvet Underground), aux accents militaires, le souligne fort bien.
Très vite, par des scènes courtes qui s’enchaînent avec une fluidité constante, ce long métrage étonne, surprend, mais d’une manière qui n’est jamais facile ou grossière. Comme souvent, tout est affaire d’équilibre et sur ce plan, Paul Sanchez est revenu ! n’est jamais pris à défaut. Il affirme d’emblée une tonalité singulière, embarquant le spectateur dans un récit à la fois profondément cinématographique et ancré dans le réel, étrange et pourtant crédible. On est autant dans un western décalé que dans un fait divers ordinaire ; dans le sud de la France que dans un paysage de cinéma, chargé de mythologie. La force du film est de ne jamais forcer trop sur l’un ou l’autre de ses éléments, d’où cette idée d’équilibre dont il était à l’instant question.
La caractérisation des personnages reflète cette même qualité : ils ne ressemblent pas aux figures classiques que l’on croise dans la plupart des polars, les scénaristes (Patricia Mazuy et Yves Thomas) leur ayant donné des couleurs différentes – mais cependant l’on croit fermement à chacun d’entre eux et ils illustrent chacun à leur manière le propos du film, d’où la grande cohérence de l’écriture.
La réussite de Paul Sanchez est revenu ! réside en partie dans un précieux accord entre la forme et le fond : c’est parce que le film parle notamment de la fascination qu’exercent sur nous les histoires, les légendes et la fiction (autant d’éléments qui nous sortent d’un quotidien pas toujours passionnant, voire douloureux) qu’il emprunte volontiers à une certaine mythologie cinématographique (le polar et les westerns dans les grands espaces), et c’est parce qu’il parle en même temps d’une réalité très humaine, banale même (l’ennui, la frustration et la souffrance ordinaires) qu’il conserve une dimension réaliste et intime.
Qu’il mente, qu’il s’égare, qu’il joue un rôle ou qu’il choisisse de disparaître, l’humain est en effet ici au centre de tout, et il est filmé avec une empathie palpable, qui ne trompe pas un instant quant à la sincérité propre à la démarche de Patricia Mazuy.
Paul Sanchez est revenu ! surprend par un alliage équilibré de réalisme et de singularité, de décalage et d'authenticité. Surtout, il nous entraîne avec virtuosité dans un récit dynamique qui ne perd jamais de vue sa matière principale, à savoir le rapport trouble qu'entretiennent ses personnages avec la réalité et leurs fantasmes, entre le quotidien et la fiction - rapport à mettre en perspective avec le concept même du cinéma.
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