Film d’Ann Sirot et Raphaël Balboni
Année de sortie : 2023
Pays : Belgique, France
Scénario : Ann Sirot et Raphaël Balboni
Photographie : Jorge Piquer Rodriguez
Montage : Sophie Vercruysse
Musique : Julie Roué
Avec : Lucie Debay, Lazare Gousseau, Nora Hamzawi, Florence Loiret Caille, Florence Janas
Avec leur second métrage, le joliment nommé Le Syndrome des amours passées, Ann Sirot et Raphaël Balboni interrogent, avec beaucoup d’humour, les conventions et stéréotypes liés au couple, à la famille et à la masculinité.
Synopsis du film
Sandra (Lucie Debay) et Rémy (Lazare Gousseau) veulent avoir un enfant, mais leurs tentatives n’aboutissent pas, sans raison apparente. Un jour, le médecin qui les suit prétend avoir identifié leur problème : ils souffrent d’un syndrome objet de récentes études aux États-Unis, celui des amours passées.
Le remède à ce mal mystérieux sort largement des sentiers battus de la médecine : Rémy et Sandra doivent coucher à nouveau avec chacun de leurs ex, sans exceptions. Avec méthode, mais non sans appréhensions, le couple initie un long parcours, semé d’embûches…
Critique de Le Syndrome des amours passées
La salle était bien remplie en ce mardi 24 octobre 2023 au Majestic Bastille, cadre de la dernière avant-première du film Le Syndrome des amours passées. Le duo Ann Sirot et Raphaël Balboni était présent, ainsi que la comédienne et comique Nora Hamzawi, qui tient un rôle secondaire (mais savoureux) dans le film. Salle remplie et visiblement conquise à en juger par les rires qui fusaient régulièrement pendant la séance, et par le nombre de personnes qui sont restées à leur place pour la session de questions-réponses organisée après la projection.
Il faut dire qu’il y a de quoi être conquis. La comédie romantique est un genre qui possède ses classiques, mais dans lequel on trouve aussi beaucoup de films prévisibles et conventionnels dans leur approche. Aucun de ces termes ne convient à ce qui est nous est proposé ici. Le point de départ, invraisemblable, rapproche le film d’une romantic fantasy américaine ; mais ce prétexte volontairement absurde est avant tout une façon cocasse d’interroger certaines idées reçues, et de confronter les personnages principaux à des questionnements renvoyant à des sujets de société très actuels.
D’emblée, à travers la caractérisation des protagonistes masculin et féminin, le tandem de réalisateurs-scénaristes non seulement tord le cou à des clichés (la femme a eu beaucoup plus de conquêtes que l’homme) mais explore intelligemment certains complexes (ceux, pour le coup très masculins, qu’éprouve le sympathique Rémy fasse à sa liste d’ex-compagnes, trop courte à son goût) ainsi que des questionnements sur les notions de fidélité et de famille sur lesquelles le film apporte un éclairage à la fois amusé, sensible et quelque peu libertaire, la quête de l’harmonie et du bonheur ne se conjuguant guère ici avec une vision standardisée du couple hétérosexuel (diantre, cette phrase est bien longue).
Bien entendu, ces thèmes sont fréquents dans le cinéma d’auteur contemporain, mais ils ne sont pas toujours traités avec un tel sens du récit (le scénario décrit intelligemment l’évolution de chaque protagoniste et de leur dynamique relationnelle) et de la caractérisation (même les personnages secondaires sont assez soignés en termes d’écriture), et aussi avec un humour aussi efficace, jamais vulgaire, le mérite revenant ici non pas seulement à la plume des deux auteurs, mais également à des comédiens tous excellents, qui selon la méthode Sirot/Balboni se sont appropriés leur texte et leur rôle plutôt que de s’y tenir à la virgule près.
Sur le plan esthétique, la réalisation alterne entre un style privilégiant le naturel et la spontanéité à des séquences extrêmement chorégraphiées aux teintes pop et colorées, notamment les scènes de sexe qui du coup n’en sont pas vraiment, puisqu’on y voit des corps en mouvement certes, mais d’une façon qui évoque davantage un spectacle de danse contemporaine qu’une explicite partie de jambes en l’air. En représentant ainsi le sexe à l’écran, les réalisateurs ont fait le choix d’une légèreté assumée, le film finissant par ressembler à une sorte de bulle cinématographique que les aléas du quotidien déforment un peu parfois, sans jamais la percer. Ainsi, s’il soulève de vraies questions, Le Syndrome des amours passées se présente avant tout comme une sorte de fable, s’efforçant (avec succès) d’éveiller chez le spectateur une sensation de plaisir et de confort. Certains y verront une limite, d’autres un parti pris plutôt agréable en ces temps tourmentés.
La musique du film
Cerise sur ce gâteau à la fois sucré et léger, la brillante musique originale composée par Julie Roué, qui mélange des thèmes de facture assez classique – baroque parfois – avec de la pop électro.
La compositrice n’en est pas à sa première partition pour le cinéma : elle a signé la BO de plusieurs longs métrages récents, souvent des premiers ou seconds films.
L’émission Court-circuit (ARTE) lui a consacré le numéro ci-dessous, dans lequel elle décrit son parcours, sa méthode et explique les particularités de la musique de film.
Le Syndrome des amours passés déploie une vision moderne du couple au fil d'un récit drôle et bien construit, servi par une réalisation inventive et des comédiens inspirés.
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