Moyen métrage de Joe Dante
Année de diffusion TV : 2006
Pays : États-Unis
Titre original : The Screwfly Solution
7ème épisode de la saison 2 de l’anthologie TV Masters of Horror, produite par Mick Garris
Scénario : Sam Hamm, d’après la nouvelle The Screwfly Solution, de Raccoona Sheldon
Photographie : Attila Szalay
Montage : Marshall Harvey
Musique : Hummie Mann
Avec : Kerry Norton, Jason Priestley, Linda Darlow, Brenna O’Brien, Elliott Gould
Seconde contribution de Joe Dante à la série TV d’anthologie Masters of Horror, The Screwfly Solution (La Guerre des sexes en français) comprend des éléments de critique sociale fréquents chez le réalisateur de Gremlins, et se classe parmi les bons épisodes de la série.
Synopsis du film
Alan Alstein (Jason Priestley) et Barney Braithwaite (Elliott Gould) mettent en place la technique de l’insecte stérile (TIS) pour éradiquer un insecte dangereux dans une zone forestière tropicale.
Peu de temps après, de nombreux féminicides surviennent aux États-Unis, à des emplacements qui évoquent la logique de propagation d’une pandémie. Parallèlement, un mouvement religieux sexiste, les Fils d’Adam, justifie ouvertement les crimes perpétrés contre les femmes. Bella Sartiano (Linda Darlow), une épidémiologiste qui connaît bien Alan et sa femme Anne (Kerry Norton), mène l’enquête. Et ses premiers constats sont alarmants…
Critique de The Screwfly Solution (La Guerre des sexes)
Même si tous les épisodes qui la composent ne se valent pas, l’anthologie Masters of Horror, créée par Mick Garris (qui a bien failli être éditée en Blu-ray en France, mais hélas le projet fut avorté), reçut dans l’ensemble un assez bon accueil critique lors de la diffusion de la saison 1 en 2005. L’année suivante, ce fut au tour de la saison 2 de voir le jour. Certains réalisateurs ont collaboré à chacune des deux saisons et c’est le cas de Joe Dante, auteur de Homecoming puis de The Screwfly Solution. Si le premier est une satire fustigeant la politique de Bush et la guerre en Irak, le second comporte également une dimension politique, particulièrement d’actualité puisque le scénario aborde à la fois les questions du réchauffement climatique et du patriarcat.

Il est intéressant de noter que le scénario (de Sam Hamm) est basé sur une nouvelle écrite par l’autrice Alice Bradley Sheldon et publiée, en 1977, sous le pseudonyme de Raccoona Sheldon. Sheldon abordait fréquemment, dans ses écrits, la question du genre, ayant été fortement influencée par la seconde vague du féminisme, qui débuta au début des années 1960 et qui compléta la première (axée principalement sur l’accès au vote) en revendiquant l’émancipation des femmes dans tout un ensemble de domaines (sexualité ; famille ; travail ; reproduction ; etc.).

L’histoire de The Screwfly Solution propose à la fois une réflexion critique sur l’impact de l’activité humaine sur l’environnement (cet aspect est particulièrement souligné dans l’adaptation télévisuelle, qui évoque explicitement la question du dérèglement climatique) et une dénonciation de la violence masculine à l’encontre des femmes. Dans le film de Dante (comme dans la nouvelle), le désir hétérosexuel masculin entraîne systématiquement, chez les sujets contaminés, une pulsion meurtrière à l’égard de « l’objet » de ce même désir (les femmes).

Ce qui est intéressant, c’est que dans une scène clé du film, au cours de laquelle des ouvriers du bâtiment harcèlent sexuellement Anne et sa fille Amy (Brenna O’Brien), on se demande si les hommes en question sont contaminés, ou s’il s’agit d’un cas tristement ordinaire de harcèlement de rue (la scène n’apporte d’ailleurs pas de réponse à cette question)… Manière évidente de souligner que le motif de l’épidémie, dans le récit, est surtout une façon de métaphoriser une violence sexiste (et sexuelle) bien réelle, et ne se résume pas à un simple ressort de science-fiction.

Cet épisode très sombre comporte aussi une critique (à travers le mouvement des fils d’Adam, tout une programme…) de certains aspects de la religion, laquelle a souvent entretenu, au cours de l’histoire, des théories et idées sexistes (un épisode particulièrement révélateur étant la tristement célèbre chasse aux sorcières ; d’une certaine façon, les hommes dans The Screwfly Solution mènent d’ailleurs une chasse aux sorcières généralisée).

L’histoire est donc pertinente thématiquement et plutôt bien menée. Côté réalisation, The Screwfly Solution a été tourné avec une caméra numérique, ce qui était semble-t-il inédit à l’époque ; mais il faut admettre que le rendu n’est visuellement pas des plus convaincants, et a même pris un sacré coup de vieux dans certaines séquences. Toutefois, le récit est suffisamment haletant, et l’interprétation suffisamment bonne, pour que cette relative modestie sur le plan esthétique ne gâche pas le plaisir de visionnage. Homecoming étant également réussi, on peut donc dire que la contribution de Joe Dante à Masters of Horror aura été de qualité, contrairement, par exemple, à celles, plus décevantes, de John Carpenter ou Tobe Hooper. Enfin, La Guerre des sexes permet par ailleurs de s’intéresser à l’œuvre d’Alice Sheldon, laquelle ne semblait manquer ni d’imagination, ni de lucidité.
Anecdotes
Jason Priestley est surtout connu pour son rôle dans la série culte des années 1990 Beverly Hills, où il interprétait le rôle de Brandon Walsh. Il est plutôt convaincant dans The Screwfly Solution, au même titre que l’actrice britannique Kerry Norton, la véritable héroïne de l’épisode.
On retrouve au casting le célèbre acteur Elliot Gould, dont l’imposante filmographie ne pourrait être résumée ici. Il a notamment campé un Philip Marlowe inoubliable dans Le Privé (1973), de Robert Altman.
Sam Hamm, le scénariste de cet épisode de Masters of Horror, a co-écrit le Batman de Tim Burton (1989).
Autres épisodes de Masters of Horror
The Screwfly Solution (La Guerre des sexes) met en image un récit d'Alice Sheldon qui reste profondément d'actualité, qu'il s'agisse de sa critique du patriarcat ou de l'impact de l'activité humaine sur l'environnement. Bien que d'une facture visuelle modeste, il s'agit de l'un des épisodes les plus intéressants de la série Masters of Horror en termes de thématiques.
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