Film de David et Raphaël Vital-Durand
Pays : France
Année de sortie : 2018
Scénario : Stéphane Miquel, David Vital-Durand et Raphaël Vital-Durand, d’après le roman Et mon cœur transparent de Véronique Ovaldé
Photographie : Jérôme Robert
Montage : Richard Marizy
Musique : Erwan Coïc
Avec : Julien Boisselier, Caterina Murino, Serge Riaboukine, Sara Giraudeau, Magaly Berdy
Lancelot : Le monde est limpide et mon cœur, transparent.
Et mon cœur transparent remue les codes du polar à la française par le biais d’une atmosphère décalée, mêlant film noir et conte engagé. Une réussite.
Synopsis du film
Lancelot Rubinstein (Julien Boisselier) se laisse porter par un mariage monotone et un quotidien sans surprises, jusqu’au jour où il rencontre la belle Irina (Caterina Murino), avec laquelle il se met rapidement en couple. Tous deux partagent des jours heureux jusqu’au jour où Irina meurt dans des circonstances mystérieuses. Lancelot réalise alors peu à peu qu’il ignorait beaucoup de choses sur sa compagne…
Critique de Et mon cœur transparent
Avant de réaliser avec son frère Raphaël Et mon cœur transparent, son premier long métrage pour le cinéma, David Vital-Durand a tourné des clips (pour Brigitte Fontaine et Sinead O’Conor, notamment) et a participé (en 2013) au Cross Channel Film Lab, un laboratoire de recherche dont la vocation est de favoriser l’utilisation de technologies modernes (comme la 3D et les effets spéciaux) chez des films à petit et moyen budget.
Ce background se ressent dans l’esthétique stylisée et sophistiquée de Et mon cœur transparent, qui prend à rebours un certain réalisme à la française (n’y voir rien de péjoratif). Mais attention, si les effets de style au cinéma brassent parfois du vide, ils sont ici mis au service du récit ; un récit comparable à un tableau dont l’auteur se serait risqué à des alliages de couleurs singuliers, des perspectives déroutantes.
Le roman de Véronique Ovaldé sur lequel le film est basé (Et mon cœur transparent, publié en 2008) comprend aussi bien des motifs empruntés au hardboiled façon Raymond Chandler (le personnage campé par Caterina Murino évoque l’archétype de la séductrice mystérieuse qui hante les romans noirs) que l’univers plus onirique des contes, auquel le prénom du héros (Lancelot, interprété par Julien Boisselier) renvoie directement. Tout cela est intégré à un récit souvent drôle, toujours alerte, dans le fond très simple mais qui est construit et filmé d’une manière inventive, si bien qu’on éprouve rapidement l’agréable sensation de fouler un terrain nouveau, distinct de celui vers lequel nous guident la majeure partie des polars français.
C’est que l’on sent ici un parfum de liberté que ces derniers n’exhalent qu’assez rarement, sauf par exemple chez des auteurs comme Guillaume Nicloux (Le Poulpe, avec lequel Et mon cœur transparent partage d’ailleurs un regard critique sur les milieux d’argent). Cette singularité risque malheureusement de se retourner contre Et mon cœur transparent, commercialement parlant – mais elle justifie que l’on défende ce film intrigant et engagé, ainsi que la démarche artistique sincère et originale dont il témoigne.
Bande-annonce
Et mon cœur transparent séduit par son audace formelle et une liberté de ton que les réalisateurs manient avec un mélange de fantaisie et de rigueur. Si l'on ajoute à ces qualités une belle galerie de comédiens et une bande originale efficace (d'Erwan Coïc), on en conclura qu'on tient là un premier film prometteur, dont on espère que l'originalité assumée ne rebutera pas un cinéma français peu friand des contre-allées.
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