Film de Fabien Gorgeart
Année de sortie : 2017
Pays : France
Scénario : Fabien Gorgeart
Photographie : Thomas Bataille
Montage : Damien Maestraggi
Musique : Guillaume Baurez
Avec : Clotilde Hesme, Fabrizio Rongione, Thomas Suire, Grégory Montel
Diane a les épaules parvient à traiter d’un sujet complexe – la GPA – à travers une approche à la fois légère, sensible et nuancée.
Synopsis du film
Diane (Clotilde Hesme) est certaine de ne pas vouloir d’enfant. Aussi, lorsqu’elle décide de porter celui d’un couple d’amis homosexuels, elle est persuadée de pouvoir gérer la situation sans problèmes.
Sa rencontre avec Fabrizio (Fabrizio Rongione), mais plus généralement le cours des événements, vont peu à peu confronter la jeune femme à des sentiments plus complexes…
Critique de Diane a les épaules
La question de la GPA (gestation pour autrui) a été fréquemment abordée en France au cours de ces dernières années (notamment à l’occasion de la loi sur le mariage pour tous), et divise indéniablement une partie de la société. Pour son premier long métrage en tant que réalisateur (et scénariste), Fabien Gorgeart s’est donc attaqué à un sujet délicat, vis-à-vis duquel les positions des différents états dans le monde varient parfois grandement (Wikipédia liste au total six statuts juridiques distincts selon les pays dans son article consacré à la GPA). Comme beaucoup de questions de ce type, il n’est pas rare qu’elle génère – chez ses détracteurs comme parfois chez ses défenseurs, d’ailleurs – des réactions extrêmes ou (et cela concerne pour le coup surtout les détracteurs) franchement caricaturales ; par exemple la GPA est souvent réduite, par ceux qui la critiquent, à sa forme lucrative alors qu’il existe bien sûr une forme altruiste – et c’est précisément de cette forme dont il est question dans Diane a les épaules.
Une erreur fréquente, quand on aborde un sujet de société (quel qu’il soit), est de livrer ce qui ressemble finalement davantage à un tract militant ou à une leçon de bonne conduite qu’à une oeuvre d’art. Fabien Gorgeart est très loin de commettre cette erreur en ce sens qu’il a l’intelligence, dans Diane a les épaules, d’interroger le spectateur et de susciter sa réflexion, plutôt que de lui asséner sur le crâne un point de vue simpliste.
Le film met en scène des personnages crédibles, consistants, qu’il confronte à la situation initiale (une femme accepte de porter un enfant pour un couple d’amis gays) avant d’observer leurs différentes réactions au fil du temps, en se gardant bien de juger ces dernières de but en blanc (même, d’ailleurs, quand elles sont inappropriées). Évidemment, c’est Diane qui est au centre de tout cela, et la comédienne Clotilde Hesme incarne avec beaucoup de grâce ce personnage féminin attachant, drôle, moderne, qui traverse des sentiments et des émotions contrastés.
La grande réussite de Diane a les épaules est de trouver le ton juste entre humour et sérieux, sensibilité et légèreté, tout en illustrant habilement les différentes complications que le choix de Diane provoque dans son existence (comment se définir par rapport à l’enfant ; comment gérer sa propre vie de couple ; comment appréhender des émotions parfois paradoxales) et dans celle de son entourage (parfois intrusif). Et cela sans la moindre lourdeur, mais au contraire avec une belle délicatesse et aussi un vrai sens de l’épure.
Le film est en effet concis (à peine une heure et demie), mais cela suffit amplement quand l’écriture, la réalisation et le jeu des comédiens sont suffisamment expressifs et précis. L’exemple le plus représentatif de ces qualités est la scène finale, qui en un unique plan séquence traduit toutes les émotions – parfois contradictoires – par lesquelles la protagoniste est passée au cours de son expérience vertigineuse. Au spectateur de composer avec cette mosaïque émouvante et pleine de nuances, qui pose des questions, suggère finement des réponses mais laisse à chacun le soin de formuler les siennes.
On notera un détail du scénario sans doute significatif : comme la jeune héroïne de Baden Baden, Diane est en train de rénover une maison dans le film ; ce qui, on peut du moins le supposer, symbolise l’idée de transition et de construction relative à sa vie personnelle.
Diane a les épaules témoigne d'une vraie empathie pour ses personnages et adopte une approche tout en nuances, en invitant chacun à réfléchir sur le sujet qu'il aborde. Ce premier long métrage présente également de vraies qualités sur le plan formel (la photographie de Thomas Bataille est réussie) et de l'interprétation ; outre l'excellente Clotilde Hesme, on citera les comédiens Fabrizio Rongione (vu notamment chez les frères Dardenne), Thomas Suire et Grégory Montel, tous irréprochables.
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