Film de Sam Raimi
Titre original : Drag me to Hell
Année de sortie : 2009
Pays : États-Unis
Scénario : Sam Raimi, Ivan Raimi
Photographie : Peter Deming
Montage : Bob Murawski
Musique : Christopher Young
Avec : Alison Lohman, Justin Long, Lorna Raver, Dileep Rao.
Avec Jusqu’en enfer, Sam Raimi réalise un film de genre jouissif, drôle et sans prétention, synonyme de retour aux sources pour le réalisateur de la trilogie des Evil Dead. Un bon divertissement.
Synopsis
Christine Brown (Alison Lohman) travaille dans une banque où elle convoite le poste d’assistante de direction. Sous la pression de son responsable, qui lui fait comprendre qu’elle doit savoir traiter durement certains dossiers – à l’instar de son collègue Stu, également en course pour la promotion – elle refuse d’accorder un troisième crédit immobilier à Mme Ganush (Lorna Raver), une étrange et inquiétante gitane qui risque ainsi de se voir saisir tous ses biens.
Mais l’extravagante vieille femme est une sorcière qui, pour se venger, lance un sort à Christine à la suite d’un corps à corps épique dans un parking. La malédiction du Lamia, impitoyable démon évoquant l’aspect d’un bouc, pèse désormais sur les frêles épaules de Christine…
Critique
Sam Raimi et le cinéma d’horreur
En 1981, Sam Raimi réalise son premier long métrage, Evil Dead, avec Bruce Campbell (Bubba Ho-Tep), copain de fac, dans le premier rôle. Le film – un petit budget – est devenu rapidement culte, de par l’originalité de sa mise en scène et surtout, un mélange efficace de gore et d’humour. Raimi réalise deux suites dans le même style et il faudra attendre 2009 pour son grand retour dans le cinéma d’horreur, avec Jusqu’en enfer. Entre temps, le réalisateur s’est illustré avec talent dans le film noir (Un plan simple, en 98) fantastique (Intuitions, avec Cate Blanchett, en 2000) et l’adaptation de comics avec les trois volets de Spiderman.
Il revient donc à ses premiers amours en tournant Jusqu’en enfer, qui réaffirme son goût pour un cinéma purement fun, divertissant et sans prétention, ainsi que sa maîtrise de la réalisation, du montage, et de l’ensemble des procédés cinématographiques visant à créer la peur, la surprise et l’amusement du spectateur.
Jusqu’en enfer : un excellent divertissement
Si on peut lui reprocher de recourir à des procédés un peu faciles pour faire sursauter son public (difficile de ne pas bondir sur son siège quand le mauvais esprit se manifeste brusquement avec une montée du niveau sonore particulièrement terrassant et soudain), Jusqu’en enfer ne saurait pâtir de ce léger recours à la facilité, le film ne prétendant nullement révolutionner le genre mais justement en appliquer les codes avec une habileté, un savoir faire et un sens du second degré typiques du cinéma de Sam Raimi.
Ici, le maître mot est plaisir, et Jusqu’en enfer est de toute évidence un film à voir au cinéma pour sursauter et rire en chœur avec les autres spectateurs. Alternant séquences effrayantes mais jamais glauques et d’ailleurs assez peu violentes, et scènes de pure comédie (le dîner dans la belle famille de l’héroïne, la séance de spiritisme en présence d’une chèvre perplexe), le film redonne ses lettres de noblesse à un cinéma d’épouvante décomplexé et résolument fun.
Mais Jusqu’en enfer est aussi la preuve qu’un film de genre divertissant peut posséder de réelles qualités cinématographiques – qualités auxquelles le Festival de Cannes 2009 a rendu hommage en projetant le film hors compétition. La réalisation inventive et le montage contribuent largement à la réussite du film, servant aussi bien sa dimension effrayante que comique. Raimi maîtrise parfaitement l’ensemble des procédés qui permettent de maximiser l’impact de chacune des scènes auprès du spectateur.
Sans vouloir faire passer de message quelconque, Jusqu’en enfer dresse néanmoins une peinture critique du monde du travail, puisque c’est en agissant contre sa nature et ses principes – Christine Brown désirait, au fond d’elle-même, accorder un nouveau crédit à la vieille gitane – et en adoptant sous la pression une conduite nécessaire à son évolution professionnelle que l’héroïne se condamne, en quelques sortes, à l’enfer.
N’oublions pas non plus de souligner le charme indéniable de l’interprète principale, la très jolie Alison Lohman, qui nous offre un moment de cinéma tout à fait délectable lorsqu’elle se débat dans une tombe, vêtue d’un tee-shirt humide – dont on regrette qu’il ne soit pas blanc.
Plus d’horreur à Cannes !
Jusqu’en enfer est un des rares films d’épouvante à avoir été projeté au dernier Festival de Cannes, sans doute en raison du crédit dont bénéficie son réalisateur dans le milieu du cinéma. On espère à l’avenir que le cinéma de genre gagnera sa place parmi les films en compétition officielle d’un festival qui n’arrive pas à se débarrasser de tous ses préjugés. Quand on sait que le costume est obligatoire pour assister à certaines projections, on se dit que Cannes gagnerait à écarter certains codes et artifices qui n’ont définitivement rien à voir avec le 7ème art.
Jusqu'en enfer est un réjouissant film d'horreur qui cherche avant tout à procurer des sensations fortes. Sam Raimi a probablement pris du plaisir à tourner cette fable horrifique qui au passage, égratigne le monde de la finance et des banques. Efficace et amusant.
2 commentaires
Aussi fun qu’un Evil Dead, j’ai adoré !
Cannes abrite l’horreur depuis ses débuts… mais uniquement au Marché du Film ! Ce genre commercial s’y monnaie loin des robes de soirées et des tapis rouge – belle métaphore de ghetto économique et de parade dérisoire.