Film de Peter Hyams
Année de sortie : 1981
Pays : États-Unis
Scénario : Peter Hyams
Photographie : Stephen Goldblatt
Montage : Stuart Baird
Musique : Jerry Goldsmith
Avec : Sean Connery, Peter Boyle, Frances Sternhagen, James B. Sikking, Kika Markham, Clarke Peters
Lazarus: Your wife is one stupid lady. You wanna go and get drunk?
Marshal William T. O’Niel: Yes…
Lazarus: At least you have some sense left.
Outland est un film de science-fiction sobre et efficace, qui transpose habilement les codes du western traditionnel dans l’espace.
Synopsis d’Outland
Au sein d’une colonie minière implantée sur une lune de Jupiter, les morts mystérieuses se multiplient parmi les ouvriers. A chaque fois la thèse de l’accident ou du suicide est avancée, sans qu’aucune autopsie ne soit effectuée.
Intrigué, le shérif William T. O’Niel (Sean Connery), qui vient à peine de prendre ses fonctions dans la base, décide de faire son enquête.
Critique du film
A la base, Peter Hyams souhaitait réaliser un western « classique » mais à cette période (début des années 80) les studios ne misaient plus trop sur ce genre ; la science-fiction, en revanche, avec les sorties retentissantes des deux premiers épisodes de la saga Star Wars (1977 et 1980) et d’Alien (1979), était alors largement plébiscitée par le public et les producteurs. Hyams s’est donc adapté à cette nouvelle demande sans pour autant renoncer à ses idées de base – c’est d’ailleurs ce qui contribue à faire d’Outland un film singulier.
La trame emprunte beaucoup à celle du célèbre western Le Train sifflera trois fois (High Noon, 1952) – comme quoi Hyams est clairement resté dans la lignée de son projet initial. On retrouve en effet la figure du shérif livré à lui-même (Gary Cooper dans High Noon, Sean Connery dans Outland) dont les appels à l’aide, face à la menace qui le guette, se heurtent à l’indifférence, la peur ou encore les intérêts d’une foule passive. Hyams ajoute à ce schéma de base des éléments propres à sa sensibilité, agrémentant notamment le récit d’un discours pointant les dérives du capitalisme – et plus particulièrement sa recherche effrénée de la performance économique au détriment, parfois, de la sécurité des individus. Pour illustrer ce point de vue, Outland met en scène un cas de figure assez extrême mais qui, à bien des égards, n’est pas si éloigné d’une certaine réalité – en ce sens que si on les recensait à l’échelle de la planète, les situations plus ou moins comparables (sur le fond) à celle décrite dans le film seraient certainement très nombreuses.
Fondamentalement, Outland pourrait donc être transposé dans n’importe quel pays capitaliste et se dérouler au 20ème siècle, sans que le sens de l’histoire n’en pâtisse le moins du monde ; pour autant, quitte à faire un film de science-fiction, Hyams a su utiliser intelligemment le genre et le mettre au service de son récit. D’abord, en situant l’action dans une base spatiale, le metteur en scène est parvenu à créer – avec un indéniable sens du cadre et du rythme – un climat de huis-clos étouffant qui renforce la tension inhérente à l’histoire ; ensuite, le décor et l’environnement jouent un rôle capital dans la confrontation finale, laquelle est d’ailleurs particulièrement crédible et soignée.
Le scénario est un modèle de simplicité et de sobriété. L’enquête est limpide, les personnages bien définis, et l’action privilégie le réalisme au spectaculaire. Sur ces différents points, Outland témoigne à nouveau de ses filiations avec le western classique, de même que par son manichéisme assumé – l’opposition entre le bien et le mal étant volontairement très marquée. Quant à William T. O’Niel (le shérif incarné par Sean Connery), c’est un héros crédible, humain, d’un certain âge (l’acteur a une cinquantaine d’années à l’époque du tournage), dont le premier réflexe est de chercher de l’aide quand le danger se précise. A la fin du film, il utilise d’ailleurs principalement la ruse pour survivre – conscient qu’un corps à corps avec ses ennemis lui serait probablement fatal.
En accordant un soin tout particulier à l’atmosphère (la montée progressive de la tension est plutôt réussie) et à la crédibilité des situations, Hyams signe un western cosmique cohérent et épuré, servi par un prestigieux casting : Sean Connery (The Offence, The Molly Maguires, La Colline des hommes perdus) exprime parfaitement le mélange de force, d’intégrité et de sensibilité qui caractérise son personnage, tandis que Peter Boyle – une « gueule » du cinéma américain (vu notamment dans The Friends of Eddie Coyle, Taxi Driver, Hardcore) – est plus que convaincant en parfait salaud.
Sans se placer parmi les chefs d’œuvre du cinéma américain de science-fiction des années 70-80 - parmi lesquels je citerais Rollerball, Alien et bien entendu Blade Runner -, Outland est un film dont la rigueur et l'humilité (Hyams ne cherche pas à en mettre plein la vue, mais "simplement" à raconter une bonne histoire) ne sont pas sans rappeler les caractéristiques de son protagoniste. Et si l'on peut pointer quelques détails discutables (les tueurs agissent assez stupidement ; la conclusion dénote un peu avec la tonalité globale du film), ceux-ci n'ébranlent pas sérieusement la solidité de l'ensemble.
2 commentaires
Merci beaucoup pour cette critique qui m’aura fait découvrir un film modeste et efficace, avec un assez gros clin d’œil au western de Zinnemann. Je suis complètement d’accord avec toi, tant sur les points forts que sur les points faibles de ce film. Attention toutefois à ne pas confondre avec un certain « Outlander » (ça m’est arrivé), sorti en 2008, qui ne laisse pas indifférent : difficile d’oublier un navet aussi pathétique et tape-à-l’œil ! 😉
Je ne connaissais pas « Outlander », comme j’aime bien les films de monstre je vais peut-être me laisser tenter malgré tout !