Film d’Alexandre Aja
Pays : Canada, États-Unis, Royaume Uni
Année de sortie : 2016
Titre original : The 9th Life of Louis Drax
Scénario : Max Minghella, d’après le roman The 9th Life of Louis Drax de Liz Jensen
Photographie : Maxime Alexandre
Montage : Baxter
Musique : Patrick Watson
Avec : Jamie Dornan, Sarah Gadon, Aaron Paul, Aiden Longworth, Oliver Platt, Molly Parker, Barbara Hershey
Avec La Neuvième vie de Louis Drax, Alexandre Aja livre un conte étrange, fort bien raconté, qui s’affirme probablement comme son long métrage le plus abouti. Dommage qu’il ait souffert d’une distribution assez chaotique.
Synopsis du film
Louis Drax (Aiden Longworth) est un petit garçon dont la vie est agitée : il a survécu à plusieurs accidents graves au cours de sa jeune vie. Le jour de son neuvième anniversaire, au cours d’un pique-nique en compagnie de ses parents Natalie (Sarah Gadon) et Peter Drax (Aaron Paul), Louis tombe d’une falaise dans des circonstances mystérieuses.
Il est conduit à l’hôpital, où les médecins ne parviennent pas à le réanimer. Pourtant, au moment d’être transporté en chambre froide, Louis revient à la vie, bien qu’il soit plongé dans un coma profond.
Le Dr Allan Pascal (Jamie Dornan), intrigué, s’intéresse de près à ce cas hors-norme ; la police également, d’autant que le père du garçon reste introuvable…
Critique de La Neuvième vie de Louis Drax
La Neuvième vie de Louis Drax, c’est d’abord un roman de l’écrivain britannique Liz Jensen, publié en 2004 sous le titre The 9th Life of Louis Drax et qui remporta un important succès public et critique à l’époque de sa sortie. Son adaptation pour le cinéma ne se présentait pas comme des plus évidentes, car c’est un livre singulier dont la structure est relativement complexe ; on peut donc dire que pour son premier scénario, l’acteur Max Minghella (vu dans Horns, le précédent film d’Alexandre Aja, mais aussi dans The Social Network et plus récemment dans la série TV The Handmaid’s Tale) ne s’est pas attaqué à un sujet facile.
Il s’en est très bien sorti : le script de La Neuvième vie de Louis Drax est une réussite et jongle habilement avec les différentes composantes du récit (passé ; présent ; réel ; fantasmagorique…) au fil d’une narration équilibrée, en dépit des difficultés évidentes que posait la trame du roman de Jensen. On est d’emblée intrigué par cette histoire farfelue, étonnante, et cet intérêt ne décroît guère tant le film convainc dans sa gestion du rythme mais aussi au niveau de la caractérisation de ses personnages (principaux et secondaires).
Le petit Louis Drax est bien sûr au cœur de ce curieux puzzle, et le jeune comédien Aiden Longworth l’incarne de façon tout à fait remarquable ; mais du tourmenté Dr. Allan Pascal (Jamie Dornan, qui trouve ici un rôle sans doute plus intéressant que celui de Christian Grey dans la tristement célèbre franchise Fifty Shades) à la séduisante Natalie Drax (Sarah Gadon) – en passant par une policière affûtée et cinglante (Molly Parker) et un psychanalyste à la rassurante bonhomie (Oliver Platt) -, le film ne néglige aucun de ses personnages (chacun a, au minima, une particularité) et bien lui en prend : c’est l’un des critères importants de tout bon récit littéraire ou cinématographique.
Derrière son apparente complexité et son aspect intriguant, La Neuvième vie de Louis Drax délivre une variante autour d’un thème relativement classique, mais abordé ici avec une indéniable originalité : l’enfance – et son imaginaire fascinant – confronté au désordre et aux turpitudes du monde réel. Autour de ce fil conducteur, le film construit un suspense bien mené (on ne sait guère à quoi s’en tenir avant le dénouement), tandis que la caméra d’Aja exploite intelligemment la cinégénie de la comédienne Sarah Gadon, impeccable en blonde hitchcockienne qui dérègle peu à peu les radars du Dr. Allan Pascal.
La réalisation d’Alexandre Aja fait honneur au scénario rigoureux de Minghella. Des plans souvent inventifs s’enchaînent avec une fluidité parfaite, tandis que le montage (crédité à un mystérieux Baxter, fidèle collaborateur d’Aja) assure la cohérence de l’ensemble. Mais si virtuosité il y a sur le plan formel, elle est avant tout au service des enjeux de l’histoire et participe pleinement à l’immersion du spectateur. Le réalisateur de Haute Tension et de Piranha 3D maîtrise ici parfaitement son sujet et il est fort probable que ce film représente à ce jour l’une de ses œuvres les plus abouties.
Au niveau de l’atmosphère, La Neuvième vie de Louis Drax se présente comme une sorte de conte moderne où se côtoient thriller et fantastique, étrange et merveilleux, rêve et cauchemar sans que jamais une composante ne prenne totalement le pas sur l’autre ; le film tire d’ailleurs de ce dosage subtil une grande part de son efficacité. Un critique américain l’a comparé judicieusement au fameux Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro (les deux films explorent le parcours d’un enfant au sein d’une imagerie souvent inquiétante, parfois monstrueuse, et montrent l’opposition entre imaginaire enfantin et violence du monde réel), mais pour autant La Neuvième vie de Louis Drax ressemble avant tout à lui-même. C’est sans doute ce qui explique en partie la réputation confidentielle de ce troublant récit initiatique, qui n’a guère convaincu le public américain et qui n’est même pas sorti dans les salles de cinéma françaises.
Bande-annonce
La Neuvième vie de Louis Drax prouve que lorsque Alexandre Aja met son sens du rythme et du cadre au service d'un récit de qualité, le résultat est des plus convaincants. C'est d'autant plus le cas ici que les comédiens sont à la hauteur, y compris le tout jeune Aiden Longworth dont il est probable qu'on en entende bientôt parler à nouveau, malgré l'injuste échec commercial qui a ponctué la sortie de ce film atypique aux États-Unis.
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